Ce blog est fermé

7 05 2010

Ne vous en faites pas, c’est pour la bonne cause que je viens de fermer ce blog.

Bon courage à tous,

Hervé





Entretien avec Christophe, pervers narcissique

5 03 2010

Toute victime de pervers narcissique a au moins une fois rêvé de pouvoir parler « réellement » avec son bourreau, de manière franche et apaisée, en se disant la vérité et rien que la vérité. Comprendre pourquoi l’autre est pervers narcissique, pourquoi il agit ainsi, pourquoi il a besoin de détruire psychologiquement ses victimes. Comprendre ce qu’il pense, ce qu’il ressent et ce qu’il fait. Mieux cerner son bourreau pour mieux s’en détacher ensuite.

Ce rêve est, pour les victimes, inaccessible. Un pervers narcissique est réputé être incapable de se voir ainsi, et encore plus incapable d’en parler avec sa victime.

Pourtant, la suite de cet article laisse penser que c’est possible. Cet article a écrit conjointement avec Christophe, qui se sait pervers narcissique.

Le témoignage de Christophe est d’après moi exceptionnel. Parler en toute sérénité de ce mal qu’est la perversion avec quelqu’un qui se sait atteint de ce trouble, c’est comme parler avec un mort revenant de l’au-delà.  Cela n’aurait jamais été possible si Christophe n’était pas allé visiter ce blog. Surtout, cela n’aurait pas pu se faire sans sa participation active à la rédaction de cet article. C’est pourquoi je le remercie beaucoup, même s’il n’attend aucune compassion de moi.

Merci et bonne lecture,

Hervé

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Bonjour Christophe.

Bonjour Hervé.

Vous avez accepté de vous prêter à cette discussion avec moi. Je vous en remercie.

Soyez tout simplement assuré que je tacherai de faire au mieux !

Cette discussion risque d’être parfois éprouvante pour vous. Si tel était le cas, n’hésitez pas à me le dire. Nous avons tous des choses à apprendre de l’autre. Cela ne peut se faire que dans le respect de l’un et de l’autre, tant de nos vérités que de nos silences …

C’est éprouvant par moment aussi bien à travers ce questionnaire que parfois dans mon quotidien.

Vous dites être pervers narcissique. Pouvez-vous me dire pourquoi vous avez accepté cette discussion avec moi ?

J’ai accepté pour au moins m’accrocher à quelque chose qui me semble louable …

Je ne me situe pas dans l’opposition à travers cet entretien mais comme un être indépendant qui, de toute manière, vit inconfortablement certaines situations génératrice d’angoisses, de peurs voire de haine. Il y a chez moi une certaine défiance à me faire connaître, peut être même encore une forme de perversité à avouer mes mécanismes mais aussi une recherche de reconnaissance. Aussi, est t-il possible que je sois par moment dans la provocation, pour tester votre capacité à être plus positionné face à un PN. Ma mère m’ayant utilisé, je peux aussi avoir l’esprit de sacrifice et vous fournir des solutions face un éventuel bourreau.

Moi aussi, je serai sans doute par moment dans la provocation, pour vous pousser et voir comment vous réagirez (sourire !). J’ai déjà commencé en affirmant que « tout devrait nous opposer ». En fait, loin de vouloir s’opposer à vous, je souhaite juste essayer de mieux vous comprendre.

Vous affirmez être « pervers narcissique ». Cette affirmation de votre part est étonnante. Tous ceux qui connaissent ce trouble psychologique s’accordent à penser qu’il est impossible pour un pervers narcissique de s’accepter en tant que tel. Pouvez-vous me dire pourquoi vous pensez l’être ?

Il est bien possible que cela soit le cas, car je m’aperçois tout l’art que je mets parfois dans ma vie pour éviter de voir mes mécanismes.

Je confirme le fait que je refuse quand même d’être mis dans une seule case. Cela ouvre encore quelques blessures. Oui, j’ai du mal à l’accepter. Je me débats avec mes pulsions, alors disons que je me vois comme un repenti.

Je vous comprends … D’après moi, avant de devenir bourreau un pervers narcissique est d’abord victime de son passé, de son enfance, de ses parents. Il me semble en effet que l’on devient généralement pervers narcissique parce que l’on a été élevé, dans son enfance, par un(e) pervers(e) narcissique. Pouvez-vous me dire si c’est vrai pour vous ? Parlez-moi de votre enfance …

J’essaierai de faire de mon mieux plus tard pour l’histoire plus précise de mon enfance.

Mon travail personnel m’a permis de comprendre que j’ai été victime, mais forcément co-responsable, de ma relation particulière avec ma mère, Je vous invite à vous documenter sur le Vampirisme et le mythe de Golem, là vous aurez de quoi vous faire peur. Au prix de nourrir le déficit narcissique de ma mère, le mien s’est vidé. Donc, ma mère est une PN. Aujourd’hui, j’arrive à être positionné et à ne plus avoir peur d’elle. Mais j’ai appris à fonctionner en trichant pour survivre. Pour me protéger d’elle, j’ai appris à utiliser les mêmes techniques qu’elle …

Tous les spécialistes de la question s’accordent à dire qu’il est quasiment impossible pour un pervers narcissique de comprendre qu’il est lui-même atteint de ce trouble. Les spécialistes affirment également qu’il est encore plus difficile, voire impossible, de se soigner. Vous semblez être la preuve que c’est possible. Qu’en pensez-vous ?

Soigner un pervers narcissique, oui, c’est possible, la condition sine qua none c’est que celui-ci puisse le reconnaître. Mais comment ? Seul un évènement amenant à la dépression peut conduire un PN vers des soins. Cependant, quelle motivation a-t-il à ce moment là ? Si c’est pour « gonfler » son déficit narcissique, ce n’est pas gagné. J’ai abordé la thérapie ainsi, ce n’est que le temps qui m’a permis de m’apercevoir ma motivation. Bien sûr, mes moments de dépression ont mis en échec cette motivation.

Mon histoire m’a amené à suivre une thérapie et à enfin m’apercevoir que je souffrais de narcissisme pathologique et qu’en effet, je possédais des mécanismes de cette maladie. Tant que la perception du monde intérieur du pervers narcissique n’est pas mise en danger, troublée ou déréglée, celui-ci réussit et continue à gonfler son narcissisme pathologique et à se détourner de ses profondes blessures, qui d’ailleurs sont anéanties par un système, que j’aurais eu du mal à comprendre, d’extraction vers l’Autre (les professionnels me comprendront). Je me suis rapproché du mythe de Narcisse pour y voir plus clair. C’est une véritable galère pour moi d’être arrivé déjà à le mettre en mot, cela fait 6 ans que je continue lentement ce travail, il m’arrive d’être encore envahi de cette impression de toute puissance, mais à partir du moment où j’ai pu enrayer ce mécanisme, j’arrive à produire l’effort nécessaire pour ne pas partir dans cet autre monde irréel. Maintenant, comment ai-je pu enrayer cela, à vrai dire sans le vouloir vraiment, mon histoire m’a amené à tomber dans des moments de dépression profonde, ce qui m’a conduit aux soins, et là tout mon monde narcissique s’est effondré. La kinésiologie m’a permis vraiment de travailler sur mes maux du corps mais cette approche a déréglé toute ma perception du monde.

Je reste tout de même en retrait sur cette notion de guérison. Le terme ne me paraît pas approprié pour ma part, mes nombreuses lectures associées à ce que je vis me persuadent que je resterais tout de même amputé de certaines choses. J’invite chacun à rester vigilant avec un PN. J’ai vraiment l’impression par moment de vivre avec un « esprit malin » si ce n’est maléfique. Aujourd’hui, j’aurais pu jeter ma fille ou mon amie, simplement parce que je me sentais contredit. Une pulsion destructrice m’envahi dans ces instants. Si ces pulsions ont pu être de moins en moins puissantes, elles sont énergétivores. Par moment, je me demande si ce que je dis appartient à cet « esprit malin » ou à l’Etre réel. Je dois modeler constamment mon entourage pour éviter d’être mis à nu, car je suis parfois très dérangé et mal à l’aise. J’évite d’avoir une trop grande promiscuité avec les gens pour être sûr que je ne tricherais pas. J’ai trouvé ces combines pour au moins essayer d’être honnête. Enfin de compte, c’est un sacré bordel (là j’ai un petit sourire).

Concrètement, qu’est ce qui vous a amené à prendre conscience que vous aviez un problème ?

J’ai quitté mon domicile conjugal et j’ai demandé le divorce en 2003. Là je suis tombé peu à peu dans la dépression, j’ai commencé seulement une thérapie un an plus tard, au retour de vacances de chez mes parents suite à une altercation avec ma mère. Et là, déprime totale et plus envie de vivre.

Pour moi c’est bien la dépression qui m’a conduit chez un psy, car il m’a été longtemps impossible de percevoir un soupçon de dysfonctionnement.

Pouvez-vous nous dire si un PN a conscience du mal qu’il inflige à l’autre ? Beaucoup de victimes de pervers narcissiques se posent cette question …

J’ai ressenti parfois une jouissance intérieure lorsque quelqu’un souffrait, sans avoir empathie. Par contre, je n’ai jamais été habité par l’envie de torturer physiquement, tout du moins, une personne. La perversion protège de la dépression. A partir du moment où je suis parfois déprimé, c’est à ce moment là que je me dis que je suis sans doute en route pour la rédemption, même si mon monde parait s’effondrer. Je ne cherche pas vraiment à guérir mais à tenter de mieux vivre. Ce site est un support pour moi, il nourrit mes manques que je ne peux pas encore combler moi même.

Vous confirmez donc une croyance personnelle : celle que le PN a conscience qu’il essaye de rabaisser de l’autre, de l’amoindrir quand il « attaque » ?

Il ne peut pas être conscient tant qu’il est dans l’illusion de toute puissance sur le monde. Sa pauvreté intérieure le guide vers un unique but : détruire tout ce qui représente la vie.

Autre question … Lauraneb, une fidèle lectrice de mon blog a dans son environnement une personne qui compte pour elle. Malheureusement cette personne est PN. Lauraneb est persuadée que cette personne est encore en souffrance quand elle « attaque » ce qui la pousse à penser qu’elle peut enrayer sa problématique. Cette personne se définit comme cachant un monstre à l’intérieur d’elle-même …Qu’en pensez-vous ?

Oui, je nomme ce « monstre » « l’esprit malin », comme un corps étranger envahissant la partie saine de l’individu … Cela engendre des troubles de la personnalité et un beau pactage de symptômes. Par contre, il est tout à fait possible d’avoir des moments d’échanges et de partage selon les périodes de troubles, voire un semblant d’adaptation parfaite à la société, mais « l’esprit malin » se réveille par moment et là restez compréhensif mais ferme et solide.

Dites-moi, si vous êtes aujourd’hui capable de dire tout cela, c’est certainement car vous avez suivi ou car vous suivez encore une thérapie. Pouvez-vous me dire en quoi consiste cette thérapie ?

Pour l’instant et depuis maintenant 5 ans, je me suis dirigé vers la kinésiologie qui agit directement sur les maux du corps. Cela a provoqué de vives tensions chez moi, et là il est préférable d’être suivi par un psy. Ma défiance envers la réalité m’a même servi d’une certaine manière. Actuellement, et depuis bientôt un an, j’effectue des séances d’acupuncture pour apaiser mon quotidien. J’évite la psychothérapie, de peur d’en devenir dépendant et de trainer.

Vous semblez avoir fait un énorme chemin vers la reconstruction … mais ce chemin parait difficile et long … Ce long chemin que vous avez parcouru, que vous a-t-il apporté ?

Désillusions, angoisses, haines, tristesse, peurs morbides, méfiance, jalousie, frustrations, jubilation, paranoïa …… Acceptation que je ne suis pas tout puissant.

Cette réponse est dure à entendre … Elle révèle une facette finalement très humaine, très touchante, qui nous aide à entrevoir une toute petite partie du calvaire que vous semblez vivre. Mais dites-moi … Cette thérapie a bien dû vous apporter des choses positives, sans quoi vous l’auriez sans doute arrêtée ?

Elle est positive car j’ai touché du doigt mes véritables symptômes bien cachés. Le mot calvaire est un peu trop fort. Ma vie est plus calme tout de même. Je l’aménage, je m’accorde bien des choses à présent.

Pouvez-vous me décrire votre vie aujourd’hui ?

Divorcé depuis 2005, j’ai une amie depuis 3 ans avec laquelle je n’ai pas cherché à me cacher. C’est une femme solide psychologiquement qui apprend à m’apprivoiser et qui sait se positionner. C’est une femme douce et remplie de tendresse mais cela m’effraie encore et peut même provoquer une réaction de peur chez moi, je dirais que je peux vivre cette tendresse comme violence. Si cela m’a permis de comprendre quel était la véritable relation que j’ai eue avec ma mère, c’est si douloureux que je fuis encore la réalité. Si j’ai stoppé mes attitudes de rabaissement auprès de certaines femmes, il m’arrive encore d’avoir le réflexe prêt à « dégainer ». Pour être plus précis, lorsque une femme présente un profil idéalisé (selon des critères définis par le narcissique : perfection, intelligence, beauté et j’en passe ….) ces attitudes sont inexistantes chez moi, par contre, une femme « faible » et contraire à la définition précédente, j’ai eu plaisir à avoir une approche hautaine et dédaigneuse. Par contre, je n’ai jamais eu envie d’être violent physiquement. Ma mère s’étant toujours positionnée dans la victimisation, j’ai aussi appris à me comporter comme le Sauveur au prix de n’a pas avoir su me nourrir seul. Pris au piège par cette relation, j’ai longtemps été envahi par cette peur d’être intrusé par les femmes. C’est une vraie galère pour moi d’accéder à une véritable intimité avec mon amie. Il n’y a qu’une seule personne qui a pu et qui puisse s’approcher au plus près, c’est ma fille, car je sais que je ne risque rien (mais çà, c’est dans ma tête). Sans doute, que son inexistence m’apprend qu’il est possible de faire confiance aux femmes. Souvent, au début de ma relation avec mon amie, j’avais toujours des temps d’arrêt lorsqu’elle me parlait pour essayer de déceler le piège éventuel. Mes troubles de la perception me demandent des temps de pause réguliers pour appréhender au plus juste la réalité. Je dois souvent me repasser les évènements marquants de ma journée pour mieux comprendre ce qui s’était réellement passé.

J’ai encore une autre question en tête … Le terme de « pervers narcissique » est généralement considéré comme une insulte, une diffamation. J’ai moi-même été attaqué en diffamation. Pourtant, je pense que la perversion narcissique, loin d’être une insulte, devrait tout simplement être considérée comme une réelle maladie psychologique au même titre que la schizophrénie, le trouble bipolaire ou la paranoïa. Qu’en pensez-vous ?

C’est une maladie, sans aucun doute. Mais je reconnais que cela peut être affreux pour un PN d’entendre ce terme.

Vous venez de me faire comprendre quelque chose d’important. Il doit déjà être très difficile à un être « normal » de s’entendre dire qu’il est PN . Or un PN ne supporte pas que l’image qu’il renvoie de lui, y compris à lui-même, soit abimée. Je comprends mieux pourquoi un pervers narcissique devient totalement hystérique lorsqu’on lui dit qu’il est pervers narcissique, même si cela est vrai …

Je confirme.

Myosotis, autre fidèle lectrice de ce blog, souhaite vous poser deux autres questions. Tout d’abord, comment définiriez-vous « la femme que vous recherchez » et surtout pour quel type de relation ? Et finalement, avez-vous le sentiment de vous priver de la femme idéale, parce que vous n’avez aucune relation possible avec elle ?

Je ne suis pas en recherche car j’ai une amie. Cette relation m’a poussé dans mes retranchements au prix de crispation, d’angoisses et de peurs. Il m’est tout simplement difficile d’installer une intimité avec elle. C’est une expérience de tous les jours. J’ai besoin de temps de pause. J’ai accepté le fait que la femme idéale que je recherchais n’est que le pur produit de mon imagination narcissique et d’ailleurs j’en suis enfin soulagé.

Vous faites allusion à la relation avec votre mère. Myosotis et moi avons cru comprendre qu’elle perturbait votre relation avec les femmes … ?

Ayant compris que je n’avais que servi, il m’a fallu m’éloigner de ma mère pour ne pas déverser sur elle toute ma haine. Ma mère, que j’ai adulée d’abord, est devenue à partir de 13 ans environ le diable à mes yeux. Ma mère, je l’ai insultée.

Pour conclure cette discussion, auriez-vous un dernier conseil à donner aux victimes de PN qui liront cet article ?

Je ne crois pas à de solutions toutes faites, mais je me propose tout simplement de vous faire part de situations de mon quotidien, pour le reste, il appartient aussi aux victimes d’aller chercher chez elles ce qui a pu faire qu’elles se sont rapprochées d’un PN. Il n’existe pas de PN sans victime. Une chose est sûre, si je suis confronté à une personne bien positionnée, j’arrive à observer chez moi une attitude de retrait.

Avec le temps, j’ai appris à me protéger de ma sensibilité. Pourtant, lorsque je repense à tout ce que vous venez de me dire, à votre sincérité et au cauchemar que vous vivez vous aussi, j’ai les larmes aux yeux …

Pour ce qui est de la compassion que vous pourriez montrer envers moi, j’ai bien peur de ne pas pouvoir encore être touché. Je constate que je ne cherche pas la compassion mais je me situe parfois comme un sacrifié qui se doit de laisser des réponses à ceux qui restent. Le mot cauchemar n’est plus approprié aujourd’hui. Je n’aspire qu’à la rédemption.

Je comprends ce que vous dites. Je tiens tout de même à vous remercier très chaleureusement pour le temps que vous avez accepté de partager avec moi. Je me permets de vous remercier au nom de tous ceux qui luttent contre la perversion narcissique et ses conséquences extrêmement graves.